Acte notarié du 28 mars 1788 signé par le baron d’Holbach et le vicomte de Bernis
Nous soussigné, Paul Thiry, Baron d’Holbach, mari le maitre des droits et actions, de Dame Charlotte Suzanne D’aine ma femme, laquelle est propriétaire d’une maison sisse (sic) à Paris rue de Taranne faubourg St. Germain, au moyen de l’abandon qui luy en a été fait, par le partage des biens de la succession de dame Suzanne Westerbourg, veuve de Mre. Nicolas d’Aine sa mère, passé devant me Gondoni et son confrère notaires à Paris, le quatorze mars présent mois d’une part - Et Pons Simon de Pierre Vicomte de Bernis Maréchal des camps et armées du Roy Gentilhomme d’honneur de Monsieur frère du Roy - au nom et comme ayant charge et pouvoir, de Mre Pons Simon de Pierre de Bernis, chevalier de l’ordre de St Jean de Jerusalem, maréchal des camps et armées du Roy, mon cousin, et comme me faisant et portant fort pour luy d’autre part sommes convenus, que le bail fait par le fondé de pouvoir de Maditte Dame D’aine, a mondit sieur le chevalier de Bernis, sous signatures privées, le cinq novembre mil sept cent quatre vingt deux, des lieux y mentionnés, dépendant deladitte maison rue de Taranne, pour trois, six, ou neuf années, commencés le premier octobre mil sept cent quatre vingt deux, n’aura lieu que pour les six premières années, qui expireront le premier octobre de la presente année mil sept cent quatre vingt huit, auquel jour moy d’holbach, promet reprendre les lieux mentionnés audit bail, et moy Vicomte de Bernis promet les luy remettre, en bon état de toutes réparations locatives, suivant l’usage, m’y obligeant tant comme ayant charge et pouvoir de mondit sieur le chevalier de Bernis, qu’en mon nom personnel.
Fait double entre nous sous nos signatures privées, à Paris ce vingt huit mars mil sept cent quatre vingt huit.
D’Holbach Bernis
[Apostille en haut à gauche de la première page]
28 mars 1788. Acte par lequel il a été convenu que le bail n’auroit lieu que pour les six 1res années.
Premier inventoire dix huit
Le document est un acte notarié du 28 mars 1788 (un an avant la mort du baron), par lequel d'Holbach accepte de mettre un terme après six ans à un bail locatif "trois six neuf" conclu le 5 novembre 1782, entre le fondé de pouvoirs de sa belle-mère, Madame d'Aisne, actuellement décédée, et le chevalier de Bernis représenté par son cousin le vicomte de Bernis.
D'Holbach agit au nom de sa femme, fille et héritière de Madame d'Aisne. Suzanne d'Aisne était une autre nièce de l'oncle du baron. D'Holbach avait épousé sa fille aînée, Geneviève en 1750. Celle-ci étant décédée en 1754, d'Holbach s'était remarié deux ans plus tard avec sa sœur cadette, Charlotte qui lui survécut jusqu'en 1815.
La famille de Pierre est originaire du Languedoc et connue dès le XIe siècle. Pons Simon de Pierre (1747-1828), vicomte puis marquis de Bernis était le neveu du cardinal de Bernis, ministre de Louis XV. Il eut diverses fonctions à la cour. Son cousin est Pons Simon Frédéric de Pierre de Bernis ( ? -1811), chevalier de l'ordre de Saint Jean de Jérusalem et maréchal de camp.
Le bien est une maison sise à Paris, rue de Taranne. Cette rue (voir le plan de Turgot de 1734, consultable sur Internet) est devenue, suite aux transformations de Haussmann, l'actuel boulevard Saint Germain, entre la rue Saint Benoît et la rue des Saints Pères. Diderot a vécu dans cette rue. Le propriétaire promet de reprendre le bien et le locataire s'engage à le remettre en bon état locatif.
Philippe Kinet
Université Libre de Bruxelles
Professeur honoraire (VUB)
Chercheur (ULB)
Bibliographie générale
VERCRUYSSE J., Bibliographie descriptive des écrits du baron d'Holbach, Paris, Lettres modernes, 1971, 46-262-XLVI p.
Principales œuvres de d'Holbach
Système de la Nature (édition de Londres, 1781), Paris, Fayard, 1990, 2 vol., 389-452 p. (coll. Corpus des œuvres de philosophie en langue française).
Système social (édition de 1773), Paris, Fayard, 1994, 569 p. (coll. Corpus des œuvres de philosophie en langue française).
Politique naturelle (édition de Londres, 1773), Paris, Fayard, 1998, 466 p. (coll. Corpus des œuvres de philosophie en langue française).
Morale universelle (édition de 1776), Stuttgart, F. Fromann, 1970, 286-256-283 p.
Ethocratie, ou le Gouvernement fondé sur la morale, Amsterdam, Marc-Michel Rey, 1776, 293 p.
Anthologie
CAZES G. et B., D'Holbach portatif, Paris, J.-J. Pauvert, 1967, 207 p.
Ouvrages sur d'Holbach
NAVILLE P., D'Holbach et la philosophie scientifique au XVIIIe siècle, nouvelle édition revue et augmentée, Paris, Gallimard, 1967, 494 p.
KORS A.C., D'Holbach's Coterie: an enlightenment in Paris, Princeton N.J., Princeton University Press, 1976, XI-359 p.
BLOM PH., A Wicked Company: the forgotten radicalism of the European Enlightenment, New York, Basic Books, 2010, XX-386 p.
TOPAZIO V., D'Holbach's Moral Philosophy: its background and development, Genève, Institut et musée Voltaire, 1956, 180 p.
LECOMPTE D., Le baron d'Holbach et Karl Marx: de l'antichristianisme à un athéisme premier et radical, Lille, Atelier national Reproduction des thèses, Université Lille III, 1980
Conférence
KINET PH, Le "Système de la Nature" de d'Holbach, Collège Belgique, 16 novembre 2011
Philippe Kinet
Université Libre de Bruxelles
Professeur honoraire (VUB)
Chercheur (ULB)
Paul Henri Thiry d'Holbach
Paul Henri Thiry (1723-1789) est né à Edesheim dans le Palatinat rhénan. Enfant unique, il est adopté par son oncle, baron d'Holbach qui l'emmène à Paris en 1735 et pourvoit à son éducation. Il hérite en 1753 de son titre et d'une partie de sa fortune.
Il étudie à Leyde de 1744 à 1748. Revenu à Paris, il y rencontre Diderot et collabore à l'Encyclopédie en rédigeant des articles sur la minéralogie et la métallurgie.
À partir de 1750 et pendant une trentaine d'années, il reçoit à dîner, deux jours par semaine, dans le salon de son hôtel de la rue Royale St Roch (aujourd'hui rue des Moulins), ce que Rousseau appellera la "coterie holbachique" (il en avait fait partie…) ainsi que d'autres invités, français et étrangers, où figuraient la plupart des esprits éclairés de l'époque. Ce salon fut un des foyers les plus actifs du développement des idées des Lumières.
Celles de d'Holbach, très radicales, sont exposées dans une œuvre qu'il composa et fit publier anonymement ou sous nom d'emprunt, principalement de 1760 à 1776. Cette œuvre comprend de nombreux ouvrages où il critique la religion et l'Église. Mais il est surtout digne d'intérêt pour son œuvre philosophique et scientifique.
Dans le "Système de la Nature" et d'autres ouvrages moraux et politiques, il donne un des exposés les plus achevés d'une philosophie rationaliste, naturaliste et déterministe basée sur une connaissance approfondie de la science: la physique de Newton, la chimie de Stahl, l'histoire naturelle de Buffon ainsi que la critique épistémologique, morale, sociale et politique des meilleurs penseurs de son temps. C'est donc le caractère systématique de cette œuvre qui en fait l'intérêt.
Mais en raison de son caractère radical elle fut condamnée, critiquée et discréditée. La philosophie résolument matérialiste et athée de d'Holbach qui le conduisit aussi à nier le libre arbitre, se heurta à l'hostilité non seulement de l'Église mais aussi de politiques comme Robespierre qui jugeaient la religion nécessaire au maintien de l'ordre social. Le retour en force de l'idéalisme au XIXe siècle la fit progressivement tomber dans l'oubli.
Depuis le livre devenu classique de Pierre Naville, dont la première édition date de 1943, d'autres travaux plus récents ont tenté de lui redonner audience.
Philippe Kinet
Université Libre de Bruxelles
Professeur honoraire (VUB)
Chercheur (ULB)
Support : feuille de papier, 1 pli
Hauteur : 323 mm
Largeur : 414 mm
Cote : 19346/2167