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Arrêté adressé à André Peyrusse, fructidor an XIII (août / septembre 1805)

Armée d’Hanovre

Au quartier général à
Fructidor an 13e


Arrêté du général en chef

Le solde de fructidor sera faite de la manière suivante

350,000 ” ” de la contribution de guerre

200,000 ” ” des domaines

50,000 ” ” de la coupe des bois

100,000 ” ” fournis par la noblesse et recouvrés par les soins et à la diligence des états.

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700,000 ” ” francs. Ces fonds devront être versés dans les caisses du receveur général de l’armée, le quinze vendémiaire au plus tard, les premiers versements commenceront le cinq : si à l’époque fixée, la totalité de la solde de fructidor n’est pas rentré, il y sera pourvu militairement.

Le montant de la contribution de guerre pendant cinq jours complémentaires, destiné à la solde de l’armée pour le même temps, devra , aussi, être versé dans les caisses de l’armée le quinze vendémiaire au plus tard, sous peine aussi de mesures militaires.

 

J.B. Bernadotte


À Monsieur Peyrusse receveur général de l’armée

Le document mis en évidence cette semaine et à la datation floue1 nous renvoie à la réalité du gouvernement du Hanovre dont Bonaparte s’était emparé après presqu’un siècle de domination anglaise2. Il s’agit en effet d’assurer le financement de l’armée et de recourir à la force si d’aventure les versements n’étaient pas effectués en temps et en heure (« il y sera pourvu militairement »). Néanmoins, il serait inexact de ne voir dans le mandat de Bernadotte en tant que gouverneur du Hanovre qu’une entreprise de prédation. « Sujet dangereux, excellent maître » disait de lui le comte de Ségur qui le détestait3 : le futur roi de Suède et de Norvège eut à cœur de traiter au mieux les populations dont il avait la responsabilité. En mars 1805 par exemple, il réussit à convaincre l’empereur de diminuer le nombre des troupes en Hanovre du fait de l’appauvrissement de la province. Plus généralement, il voulait alléger autant que possible les charges pesant sur le pays. Ses collègues à la tête d’autres pays conquis ne s’embarrassaient pas toujours de ce genre de scrupules et se contentaient de faire régner l’ordre et de maintenir l’autorité impériale. La plupart s’acquittaient de leurs tâches avec douceur quand d’autres faisaient preuve de brutalités et de maladresses. Deux se distinguèrent par leurs qualités administratives : Marmont en Dalmatie et Bernadotte en Hanovre. Ce dernier fit tout ce qui était en son pouvoir pour rendre le joug impérial en Allemagne tolérable, voire même populaire. Cela était d’autant plus difficile que Napoléon n’avait aucune confiance dans les méthodes de conciliation pour gouverner les pays conquis. Il céda toutefois aux demandes de Bernadotte (cf. supra) à plusieurs reprises. La politique de Bernadotte se voulut aussi favorable aux nécessiteux : les plus pauvres furent aidés par diverses mesures comme par exemple des distributions de repas gratuits, une réforme fiscale visant à faire reposer l’impôt sur les propriétaires fonciers, etc. La politique du maréchal français fut donc fort logiquement appréciée par les habitants du Hanovre et il jouit d’une grande popularité durant son court mandat de gouverneur4.


1 La détérioration du document nous empêche malheureusement de le dater avec précision. Il fut donc rédigé en fructidor an XIII, entre le 19 août et le 17 septembre 1805 donc, soit à l’extrême fin de la période durant laquelle Bernadotte dirigea le Hanovre.

2 SERVIÈRES G., L’Allemagne française sous Napoléons Ier, Paris, Librairie académique Didier Perrin et Cie, 1904, p. 50 et suivantes.

3 NABONNE B., Bernadotte, Paris, Albin Michel, 1940, p. 178.

4 PLUNKET BARTON D., Bernadotte. 1763-1844, Paris, Payot, 1983, p. 169-179. FAVIER F., Bernadotte. Un maréchal d’Empire sur le trône de Suède, Paris, Ellipses Édition , 2010, p. 128-132.

FRANCESCHINI É., "Bernadotte (Jean-Baptiste-Jules)", in PREVOST M., ROMAN D’AMAT R. (dir.), Dictionnaire de biographie française, Paris, Librairie Letouzey et Ané, t. VI, 1954, col. 32-36.

FAVIER F., Bernadotte. Un maréchal d’Empire sur le trône de Suède, Paris, Ellipses Édition , 2010, 395 p. (préface de Jean Tulard).

GIROD DE L’AIN G., Désirée Clary d’après sa correspondance inédite avec Bonaparte, Bernadotte et sa famille, Paris, Librairie Hachette, 1959, 414 p.

HÖJER T., Bernadotte. Maréchal de France, roi de Suède, Paris, Plon, 1971, 2 vol., 699-700 p.

KLAEBER H., Marschall Bernadotte, Kronprinz von Schweden, Gotha, F. A. Perthes, 1910, X-482 p.

NABONNE B., Bernadotte, Paris, Albin Michel, 1940, 381 p.

PINGAUD L., Bernadotte, Napoléon et les Bourbons (1797-1844), Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1901, 452 p.

PLUNKET BARTON D., Bernadotte. 1763-1844, Paris, Payot, 1983, 381 p. (traduit de l'anglais par Georges Roth, préface de P. Tucoo-Chala).

PRESSAC P., Bernadotte, un roi de Suède français, Paris, Hachette, 1942, 256 p. (coll. De l’histoire)

SCOTT F.D., Bernadotte and the fall of Napoleon, Cambridge, Harvard University Press, 1935, III-190 p.

TULARD J., « Bernadotte (Jean-Baptiste-Jules) », in TULARD J. (dir.), Dictionnaire Napoléon, Paris, Fayard, 1999, vol. 1, p. 209-210.

WENCKER-WILDBERG F., Bernadotte : Soldat, Marschall, König, Hamburg-Leipzig, Hoffmann & Campe, 1935, 328 p.

Jean-Baptiste Bernadotte

Né à Pau le 26 janvier 1763, décédé à Stockholm le 8 mars 1844. Jean-Baptiste Bernadotte était le fils d’Henri (avocat et procureur du roi) et de Jeanne, née Jeanne de Saint-Jean, apparentée à une famille noble et d’origine protestante1. Le jeune Bernadotte passa son enfance à Pau et fut élève des bénédictins. Dans un premier temps destiné au barreau comme son père, il s’enrôla au régiment Royal-la-Marine en 1780. Il servit en Corse puis en Dauphiné. Au début de la révolution, il était sergent-major avant de devenir sous-lieutenant en novembre 1791. Au début des guerres révolutionnaires, il reçut le commandement d’une demi-brigade de l’armée du Rhin sous Custine puis rejoignit l’armée du Nord où il combattit les Anglais et les Autrichiens. Il participa à la bataille de Fleurus et fut promu général de brigade. En 1797, il se rendit en Italie et y rencontra Bonaparte. Ce dernier lui donna un commandement à l’avant-garde et les succès s’enchaînèrent, notamment la prise de Trieste le 24 mars 1797. Bonaparte le chargea ensuite de remettre au Directoire les drapeaux pris à l’ennemi le 27 août de la même année. Il fut ensuite successivement gouverneur des îles Ioniennes, commandant de l’armée d’Italie puis ambassadeur à Vienne. Son séjour dans la capitale autrichienne occasionna quelques scandales et il fut rappelé par le Directoire qui le désavoua. En 1799, il refusa le commandant de l’armée d’Italie du fait de l’insuffisance des troupes. Il commanda sur le Rhin dans la région de Mannheim et de Heidelberg et se distingua par son administration sage. Barras le fit devenir ministre de la Guerre. Il rencontra bien des difficultés mais réussit à faire de nouvelles levées. Sieyès le fit toutefois tomber en septembre. Lors du 18 brumaire, il refusa de soutenir tant Bernadotte que le Directoire. Il était alors considéré comme le général des néo-jacobins, grands perdants du coup d’État. Bonaparte lui confia cependant le commandement l’armée de l’Ouest qu’il perdit suite à une conspiration à laquelle il ne prit pas part, au contraire de son chef d’état-major.

Lors de la proclamation de l’empire, Napoléon le fit malgré tout maréchal et lui donna le commandement du Hanovre (cf. Analyse). Il reprit le chemin de la guerre en 1806 avec des fortunes diverses. Il n’eut qu’un rôle effacé lors de la bataille d’Austerlitz. Il ne prit pas part aux batailles d’Iéna et d’Auerstaedt et provoqua dès lors le courroux de l’empereur. Il remporta malgré tout un important succès à Morhungen en Pologne (25 janvier 1807) mais ne rejoignit Eylau que 48 heures après la terrible bataille, suscitant une fois de plus la colère du souverain. En mars 1808, il fut chargé d’occuper les îles danoises après le bombardement de Copenhague par les anglais. L’année suivante, lors de la bataille de Wagram, il dirigea le corps des Saxons qui se débanda rapidement : l’empereur le mit à l’écart. Revenu à Paris, il rejoignit l’entourage de Fouché qui l’envoya en Belgique pour s’opposer au débarquement anglais. Les plaintes de Bernadotte indisposèrent une fois de plus l’empereur qui le releva de ces fonctions. En 1810, se posa la question de la succession au trône de Suède occupé par Charles XIII, très vieux et sans descendance. Bernadotte fut élu de façon inattendue prince héréditaire de Suède par les États généraux d’Oerebro le 21 août 1810. Napoléon, un temps hésitant, ne s’opposa pas à cette décision, espérant tenir un solide allié au nord. Grave erreur : soucieux d’assurer son avenir sur le trône de Suède, Bernadotte se rapprocha du tsar Alexandre en 1812. Il rejoignit même une coalition contre la France en 1813 et battit Oudinot et Ney la même année. Les alliés se méfiaient de lui au début de son ralliement mais devinrent vite enthousiastes devant ses succès répétés. Il s’abstint toutefois d’envahir la France. Songeait-il à en devenir le roi ? Cela est possible mais l’intrigue n’aboutit pas. Sa trahison lui fut malgré tout bénéfique : le traité de Kiel (14 janvier 1814) entérina la réunion de la Norvège à la Suède. Le 5 février 1818, Charles XIII rendit son dernier soupir : Bernadotte devint roi de Suède et de Norvège alors même qu’une légende tenace veut que ce monarque ait porté sur sa poitrine le tatouage  : « Mort aux rois ! ». Il apporta la prospérité à ces deux pays et gouverna dans un sens libéral jusqu’en 1830, plus conservateur ensuite. Sa politique économique se voulut pragmatique et protectionniste. Comme en Hanovre (cf. analyse), il combattit le paupérisme avec vigueur.


1 Pour cette notice, nous nous sommes inspiré principalement des livres de Franck Favier et de Dunbar Plunket Barton, ainsi que des notices de Jean Tulard et d’É. Franceschini (cf. orientation bibliographique).

Lettre

Support : une feuille de papier

Hauteur : 336 mm
Largeur : 210 mm

Cote  : 19346/369

Portrait

Bernadotte
J. lith de Delpech

Hauteur : 275 mm
Largeur : 180 mm

Cote  : 19346/369