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Lettre à Edmond Marchal, 30 décembre 1896

Monsieur et très estimable confrère

               En arrivant à Saint Pétersbourg, j’ai reçu votre aimable lettre, qui m’informe du grand honneur que m’accorde l’Académie royale des Sciences de Belgique, en m’associant à ces membres. Cette distinction me touche très profondément, d’autant plus que je suis de longue date en liaison avec beaucoup de ses illustres associés, dont j’estime les travaux et admire le caractère scientifique.

               Veuillez, Monsieur présenter l’assurance de ma profonde gratitude à Monsieur le Président Brialmont, ainsi que me considération distinguée à toute l’association en vous priant, Monsieur, d’agréer mes sentiments très distingués.

Dimitri Mendeleef

Monsieur le Chevalier Edmond Marchal, Secrétaire perpétuel de l’Académie

Saint Petersbourg, 18 décembre 1896 / 30 décembre 1896, Wasili Osbrow, ligne des cadets 9.

Comme à l’accoutumée pour les élections au sein de notre Académie, il est difficile (voire impossible dans le cas qui nous intéresse ici et pour la deuxième partie du XIXe siècle de façon générale) de décrire la façon dont l’élection de Mendeleïev s’est déroulée. Combien de voix ? A-t-il bénéficié d’une majorité confortable ? Y a-t-il eu débat passionné à ce sujet ? Nous n’en saurons rien. Toutefois, vu la date de cette désignation, nous pensons que la démarche fut paisible. Les travaux du chimiste russe étaient connus et reconnus depuis longtemps déjà. De plus, comme il l’évoque lui-même, beaucoup de noms de la Classe des Sciences lui sont familiers. Nos recherches nous ont permis de pouvoir désigner quelques-uns[1]. Il y a tout d’abord ses maîtres évoqués dans notre notice biographique, soit : Henri Victor Regnault, Robert Bunsen et Gustav Kirchhoff. Dans cette même biographie, nous avons également évoqué le congrès de 1860, important pour sa sociabilité scientifique. On trouve parmi les participants plusieurs associés de la Classe des Sciences de notre institution. C’est le cas de l’organisateur qui n’est autre que Friedrich Kekulé. Durant cet évènement, Stanislas Cannizzaro distribua une publication : « sur l'hypothèse d'Avogadro qui clarifie les notions d'atomes et de molécules. C'est sur cette base que les chimistes ont pu s'accorder sur les poids atomiques des éléments chimiques et que Mendeleïev a pu fonder son système périodique (ainsi que d'autres)[2] ». Il faut encore mentionner Charles Friedel, Johan von Baeyer, Georg Quincke comme associés présents à ce congrès international de chimie à Karlsruhe. Impossible toutefois de se prononcer avec certitude quant l’existence de relations entre Mendeleïev et ces personnes[3] mais l’hypothèse est loin d’être fantaisiste. Par contre, il est absolument certain qu’il avait des rapports avec Hans Thomsen et Jacobus van’t Hoff[4].

Enfin, il nous faut mentionner la totale absence d’activités de Mendeleïev pour notre Académie, comme souvent pour les associés vieillissants et vivant loin de Bruxelles. À l’occasion de son décès, le Secrétaire perpétuel Edmond Marchal loua sa mémoire lors de la séance de la Classe des Sciences du 2 mars 1907 en rappelant ses travaux sur la classification des éléments et sa réputation universelle[5].

 

 

[1] Nous ne prétendons toutefois pas à l’exhaustivité et nous sommes ouverts à d’éventuelles suggestions de nos lecteurs érudits.

[2] Extrait d’un courriel de Brigitte Van Tiggelen envoyé le 3 juin 2024. Nous la remercions vivement pour ces informations ainsi que pour d’autres noms suggérés dans cette notice.

[3] Idem.

[4] POSIN D. Q., Mendeleyev The story of a great scientist, New York : Toronto, Whittlesey House, MC. Graw – Hill Book Company, Inc., 1948, p. 298, 184.

[5] Bulletin de la Classe des Sciences, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1907, n° 3, p. 129.

GORDIN M.D., A well-ordered thing : Dimitri Mendeleev and the shadow of the periodic table, NewYork, Basic Books, 2004, 364 p.

 

KOLODKINE P., Mendeléïèv [et la loi périodique] : présentation. Choix de textes, bibliographie, portraits [et] fac-similés, Paris, Éditions Seghers, 1963, 223 p.

 

PISARZHVSKII O., Dmitri Ivanovitch Mendeleev : sa vie et son œuvre, Moscou, Éditions en langues étrangères, 1955, 102 p.

 

Oeuvres de Dimitri Ivanovitch Mendeleïev The principles 

 

POSIN D. Q., Mendeleyev The story of a great scientist, New York : Toronto, Whittlesey House, MC. Graw – Hill Book Company, Inc., 1948, 345 p.

Dimitri Ivanovitch Mendeleïev

Dimitri Mendeleïev vit le jour le 8 février 1834 à Tobolsk, une ville située en Sibérie. Il était le cadet d’une famille nombreuse (14 ou 17 enfants selon les sources). Son père, Ivan Pavlovich Mendeleïev, était professeur de littérature et dirigeait une école secondaire supérieure. Malheureusement, il décéda durant l’enfance de Dimitri : si sa femme (Maria) bénéficia d’une pension, celle-ci n’était pas assez importante pour subvenir aux besoins de cette famille nombreuse. Ne se décourageant, la veuve reprit l’usine de verre d’un membre de sa famille. Cet établissement fut toutefois l’objet d’un incendie en 1849. Maria et Dimitri partirent à Moscou avec l’espoir d’une rentrée de ce dernier à l’université mais il n’en fut rien. Au lieu de cela, il entra à l’institut pédagogique qui formait des professeurs du secondaire. Excellent élève, il y obtint une Médaille d’Excellence. Il enseigna ensuite dans un lycée à Simferopol (sud de la Russie) qu’il fut contraint de quitter quand il fut transformé en hôpital lors de la Guerre de Crimée. Il rejoignit l’université de Saint Pétersbourg en 1855 où il devint assistant en chimie. En 1859, il rejoignit l’étranger pour y étudier, d’abord à Paris avec le professeur Henri Victor Regnault. Il se rendit ensuite à Heidelberg pour y continuer ses recherches sous la direction de Robert Bunsen et Gustav Kirchhoff. En 1860, il participa à un congrès international de chimie à Karlsruhe où il rencontra de nombreux chimistes avec qui il noua des relations durables.

En 1862, il défendit sa thèse de doctorat intitulée : Considérations sur la combinaison de l’alcool et de l’eau. Il devint peu de temps après professeur de chimie à l’Université de Saint Pétersbourg. Il était très apprécié de ses élèves mais sa carrière universitaire s’arrêta brusquement quand il présenta une pétition de ses élèves au ministre de l’Éducation. Sanctionné, il démissionna mais fut nommé Directeur du Bureau des Poids et Mesures, un poste qu’il occupa jusqu’au dernier souffle.

Parallèlement à sa carrière professionnelle, il menait ses recherches scientifiques dont l’éclectisme est à souligner. Il était en effet capable de s’intéresser aux éclipses solaires, au mouvement de l’horloge à pendule, aux expéditions polaires et même aux tarifs douaniers russes et bien d’autres choses encore. Son œuvre la plus considérable fut toutefois sa classification périodique des éléments qui fut publiée en 1869. Le célèbre tableau qui est tiré de celle-ci fait toujours les délices d’une bonne partie des élèves du secondaire. Pour faire (très) simple, cette classification suit un critère très simple : l’ordre croissant des poids atomiques. De son vivant, Mendeleïev ne termina pas son tableau mais il y laissa des cases libres pour qu’y soient placés plus tard des éléments qui n’étaient pas encore connus.

Dimitri Mendeleïev rendit son dernier soupir à Saint-Pétersbourg le 2 février 1907. Son souvenir se perpétue depuis lors. L’élément radioactif 101 porte son nom (mendélévium), de même pour un astéroïde, une dorsale dans l’océan arctique, ou encore un cratère sur la face cachée de la lune[1].

 

[1] Pour cette brève biographie, nous nous sommes principalement inspiré d’une notice traduite en français (par Tina Michetti et revue par Brigitte Van Tiggelen) intitulée : « Biographie : Dimitri Ivanovich Mendeleïv », éditée en anglais par Stephen Klassen et Catherine Froese et basée en partie sur l’ouvrage de Peter Heering ayant pour titre : Historical Background : The development of the Periodic Table [consulté le 03/06/2024, https://www.uni-flensburg.de/fileadmin/content/projekte/storytelling/biografien/biografien-frz/mendeljef-biografie-fr.pdf]

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