Lettre à Louis François de Monteynard, 14 novembre 1773

A Metz le 14 novembre 1773.


 

Monsieur,
 


J’ai l’honneur de vous envoyer l’état des réparations qui ont été jugées indispensables à l’hopital militaire de Montmedy par l’ingénieur chargé du service dans cette place. Je vous supplie, Monsieur, de vouloir bien m’adresser vos ordres pour faire exécuter ces réparations dont la dépense est estimée à 421 livres 11 sous 11 deniers.

Je suis avec respect,

Monsieur,

 

Votre très humble et

Très obéissant serviteur,

De Calonne

 


M. le Marquis de Monteynard.

Il est compliqué d’interpréter avec précision ce document signé par celui qui était alors l’intendant de la généralité de Metz. Nous n’avons en effet pas en notre possession l’ « état des réparations » jugées indispensables pour l’hôpital militaire de Montmédy. La littérature consultée par nos soins1 ne nous a pas donné plus d’indications, et cela d’autant plus que les archives de la Moselle furent détruites en partie2. Il est vraisemblable cependant que les réparations susdites ont été exécutées : au XVIIIe siècle, en effet, ce genre d’établissement militaire3 est l’objet d’une attention particulière de la part du gouvernement. Les hôpitaux militaires étaient effectivement bien mieux tenus que leurs équivalents civils et les praticiens hospitaliers militaires ont été parmi les meilleurs médecins et chirurgiens du XVIIIe siècle4.


1 Il est à déplorer que nous n’avons pu consulter l’ouvrage de Pierre Adnet (Montmédy : citadelle de l’histoire, s.l., Imprimerie Michel frères, 1999, 85 p.), indisponible en Belgique : celui-ci nous aurait donné peut-être plus de renseignements sur cet hôpital militaire.

2 LACOUR-GAYET R., Calonne. Financier, réformateur et contre-révolutionnaire, 1734-1802, Paris, Hachette, 1963, p. 35. Si cette destruction n’avait pas eu lieu , on peut cependant douter de l’intérêt des historiens pour le sort de l’hôpital militaire de Montmedy à cet instant précis de son histoire.

3 Au nombre 70 selon Jacques Necker en 1784, in IMBERT J., « Hôpitaux militaires », in BELY L., Dictionnaire de l'Ancien régime : Royaume de France, XVIe-XVIIIe siècle, Paris, Presses Universitaires de France, 2010, 3e éd., p. 645 (Quadrige : Dicos poche).


4 Idem.

« Charles-Alexandre de Calonne » in BAYARD F., FÉLIX J., HAMON P., Dictionnaire des surintendants et contrôleurs généraux des finances, Paris : Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, 2000, p. 194-200.

BARON DELBEKE, « Calonne (Charles-Alexandre de) », in PREVOST M., ROMAN D’AMAT R.(dir.), Dictionnaire de biographie française, Paris, Librairie Letouzey et Ané, t. VII, 1956, col. 922-924.

DE PARREL C., Les papiers de Calonne, documents pour servir à l’histoire de la contre-révolution, Cavaillon, Mistral, 1932, XXII-271 p.

HINCKER F., « Calonne Charles Alexandre », in SOBOUL A. (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, Presses universitaires de France, 2005, 1989, p. 180-181 (rééd. Quadrige, 2005).

JOLLY P., Calonne, 1734-1802, Paris, 1949, 337 p.

LACOUR-GAYET R., Calonne. Financier, réformateur et contre-révolutionnaire, 1734-1802, Paris, Hachette, 1963, 510 p.

LEROY É, Charles-Alexandre de Calonne administrateur (1734-1802): de l'impasse du despotisme parlementaire à l'impasse d'un despotisme éclairé « à la française », thèse sous la direction de Jean de Viguerie, Université de Lille III, 2005.

SUSANE G., La tactique financière de Calonne, Paris, A. Rousseau, 1901, XXXIX-292 p.

THUILLIER G., La réforme monétaire de 1785 : Calonne et la refonte des louis, Paris, Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, Comité pour l'histoire économique de la France, 2005, 880 p. (Coll. Histoire économique et financière de la France. Recueils de documents).

Charles Alexandre de Calonne

Né à Douai le 20 janvier 1734, décédé à Paris le 29 octobre 1802. Il était le fils de Louis Joseph Dominique de Calonne1 (premier président du parlement de Flandre séant à Douai, 1767) et de Henriette de Franqueville, fille de Jacques de Franqueville, conseiller au parlement de Flandre. Il fit ses études à Paris, au collège des Quatre Nations et s’y révéla un élève brillant. À l’âge de vingt ans, il prêta le serment d’avocat au parlement de Flandre et fut élu échevin de Douai en 1757. Il abandonna toutefois ses fonctions municipales un an plus tard pour l’office d’avocat général au conseil supérieur d’Artois. En 1759, il succéda à son père comme procureur général du parlement de Flandre et fut chargé en 1765 par le ministre Laverdy de négocier avec La Chalotais - procureur général du parlement de Rennes - pour mettre fin au conflit entre le gouvernement et le parlement de Bretagne. La manœuvre échoua toutefois, ce qui n’empêcha pas Calonne d’être promu maître des requêtes de l’hôtel du roi la même année. Il fut aussi nommé procureur général de la commission chargée d’instruire le procès des magistrats de Rennes. Il fut dénoncé publiquement dans des Mémoires publiés par La Chalotais et s’attira ainsi pour longtemps le ressentiment des parlements. Le 7 octobre 1766, Calonne fut nommé à la tête de l’intendance de justice, police et finances au département de Metz, frontières de Champagne, de Luxembourg et de la Sarre. Il assura cette charge douze années durant avant de recevoir l’importante intendance de Flandres. Il y fit la connaissance de Joseph II, des princes de Condé et de Ligne, etc. Entretemps, le 12 avril 1769, il épousa une riche héritière en la personne d’Anne Joséphine Marquet qui décéda l’année suivante non sans lui avoir donné son seul enfant nommé Charles Louis Henri. Il se remaria le 3 juin 1788 avec sa maîtresse, Anne Rose Josèphe de Nettine : ces deux unions permirent à Calonne de se lier aux plus grandes familles de la finance.
La gestion minutieuse de son intendance ne le détournait pas de la vie politique et il ne manquait pas de railler la politique menée par Jacques Necker. Après la disgrâce de ce dernier, le nom de Calonne fut souvent évoqué pour le remplacer mais il dut attendre la fin des mandats de Joly de Fleury et de d’Ormesson pour être nommé contrôleur général des finances le 3 novembre 1783. Sa politique fut l’opposé de celle de Necker dont Calonne n’appréciait guère l’esprit d’économie. Il suscita une reprise économique par une série d’emprunts et une politique de dépense publique qui eurent pour conséquence d’entraîner l’agiotage et de creuser le déficit de l’état. Celui-ci provoqua l’hostilité des parlements et força Calonne à entreprendre des réformes de grande ampleur. En août 1786, il adressa au roi un Précis d’un plan d’amélioration des finances dont le but était de « revivifier l’État ». Craignant à juste titre l’hostilité de la magistrature, il réussit à faire approuver par Louis XVI et Vergennes la convocation d’une assemblée de notables, jugée plus docile que les magistrats. Il comptait faire adopter une subvention territoriale, sans distinctions de privilèges, et toutes les réformes tentées depuis les années 1750 : réduction de la taille, liberté du commerce du grain, suppression des barrières intérieures du commerce, etc. Tout cela fut vain et Calonne fut contraint de démissionner le 8 avril 1787.
Calonne se rendit alors à Londres pour y rédiger sa défense qui fut imprimée la même année. Il s’y remaria (cf. supra) et sa nouvelle femme lui apporta une richesse considérable qui lui permit de mener grand train. Quoiqu’hostile à la convocation des États généraux et au doublement du Tiers état, il rentra en France le 30 mars 1789 et se présenta aux élections de la Flandre maritime. Conspué, il regagna l’Angleterre et se dévoua alors à la cause contre-révolutionnaire dont il devint l’un des personnages les plus illustres. Sillonnant l’Europe en tous sens pour tenter d’accomplir les plans fantaisistes fomentés par l’entourage du comte d’Artois, il dépensa également une bonne partie de sa fortune pour l’organisation de l’émigration. Ses efforts ne furent pas reconnus : amer, il rejoignit l’Angleterre où il conçut un Traité de la situation de l’Europe (novembre 1795) où il critiquait tant l’attitude de Louis XVI que les agissements des émigrés en 1791 et 1792. Interdit de séjour en France depuis le 29 décembre 1792, il demanda sa radiation de la liste des émigrés et débarqua à Calais en mai 1802. Il proposa ses services à Bonaparte et lui envoya plusieurs mémoires financiers à cet effet. Ces écrits suscitèrent peu d’intérêt et son auteur mourut peu de temps après.

1 Pour cette courte biographie, nous nous sommes inspiré principalement des notices de F. Hincker et du baron Delbeke ainsi que du texte paru dans le Dictionnaire des surintendants et contrôleurs généraux des finances (cf. orientation bibliographique).

Lettre

Support : une feuille de papier

Hauteur : 318 mm
Largeur : 200 mm

Cote  : 19346/831

Portrait

Calonne.
I. lith de Delpech (avec une signature de Calonne en fac-similé).

Hauteur : 272 mm
Largeur : 180 mm

Cote  : 19346/831