Lettre à Paul Henri Spaak, 11 mars 1946
Prime Minister 10, Downing Street,
Whitehall.
11th March, 1946
[11 mars 1946]
Mon cher ami
J'ai été vivement touché de recevoir votre généreuse lettre. Il était vraiment très aimable de votre part de m'écrire de votre propre main à un moment où vous avez tant d'autres préoccupations pressantes.
Comme vous, je ne trouve pas déraisonnable d'envisager l'avenir en optimiste, et je crois que par nos séances à Londres nous avons fait un bon pas en avant. La Belgique peut bien être fière de la grande contribution que votre présidence a faite à la bonne réussite.
Nous suivons avec sympathie les difficultés qu'éprouve actuellement votre pays et nous espérons qu'il en sera bientôt sorti.
Veuillez, cher Monsieur Spaak, à l'expression de mes sentiments très amicaux.
Clément Attlee
La Lettre ci-dessus fut conçue dans le contexte des débuts de l’Assemblée générale de l’ONU. Paul Henri Spaak en fut le premier président le 10 janvier 1946. Il dut composer avec la manœuvre hostile des Soviétiques qui proposèrent la candidature du Norvégien Lie pour contrer celle de Spaak. Celui-ci l’emporta malgré tout par 28 voix contre 23. L’homme politique belge se révéla être un excellent président pour cette première session de l’assemblée : cette fonction le projeta sur le devant de la scène internationale et fit de lui un autre homme sur la scène politique belge. On comprend donc mieux l’enthousiasme de Clement Attlee face au travail du premier président de l’Assemblée de l’ONU.
1 DUMOULIN M., Spaak, Bruxelles, Éditions Racine, 1999, p. 393-394.
ATTLEE C.R., As it happened, London, Heinemann, 1954, 227 p.
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BURRIDGE T.D., Clement Attlee, a political biography, London, Jonathan Cape, 1985, XIII-401 p.
Correspondance secrète de Staline avec Roosevelt, Churchill, Truman et Attlee, 1941-1945, Paris, Plon, 2 vol., LV-332-33 p.
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Clement Richard Attlee
Né à Londres le 3 janvier 1883, décédé à Londres le 8 octobre 1967. Il était le septième enfant d’une famille de huit issue de la classe moyenne. Ses études se déroulèrent successivement à la Northaw School, le Haileybury College et à l’Université d’Oxford où il fut diplômé en histoire en 1904. De 1906 à 1909, il travailla pour la Haileybury House, une œuvre de bienfaisance. C’est là qu’il fit connaissance des enfants issus de la classe ouvrière : d’abord conservateur, ses opinions politiques évoluèrent à leur contact. Il constata que la charité n’était pas suffisante et qu’une redistribution des richesses par l’État était nécessaire. Il se rapprocha du socialisme et rejoignit les rangs de l’Independent Labor Party en 1908. L’année suivante, il fut brièvement le secrétaire de Beatrice Webb , l’une des fondatrices de la London School of Economics dont il fut professeur de 1909 à 1923. Parallèlement, il fut secrétaire de l’œuvre caritative Toynbee Hall en 1909 et en 1910. L’année suivante, il fut employé par le gouvernement pour expliquer le National Insurance Act de David Lloyd George dans l’Essex et le Somerset lors de grandes manifestations publiques. Bien que trop vieux quand la Première Guerre mondiale éclata, il réussit à se faire engager comme capitaine. Il participa à la calamiteuse bataille des Dardanelles en Turquie. Toutefois, une dysenterie l’éloigna des champs de batailles et lui sauva sans doute la vie. Il participa plus tard à la campagne de Mésopotamie en Irak mais fut grièvement blessé aux jambes lors de la bataille d’El Hannah. Il fut soigné en Angleterre et entraîna ensuite les soldats de la classe 1917.
Après le conflit, il se consacra corps et âme à la politique. Il entra au parlement en 1922 et y siégea sans discontinuer jusqu’en 1955. En 1930, il goûta au pouvoir en rejoignant le gouvernement de Ramsay Mac Donald. Il occupa les postes de Chancelier du duché de Lancaster puis celui de ministre des postes. Un an plus tard, il refusa l’union nationale avec les libéraux et les conservateurs pour la conservation de la Livre, ce qui ne l’empêcha pas d’être réélu ministre en 1931 et de prendre également la direction du parti travailliste. Il s’appliqua dès lors à appliquer un programme d’amélioration des conditions sociales, en plus d’une réorganisation de l’appareil économique. Quand un cabinet d’union nationale fut constitué par Churchill le 10 mai 1940, Attlee le rejoignit et s’avéra un partenaire loyal. Il devint premier ministre adjoint en 1942. Il s’occupait principalement des affaires intérieures, non sans une certaine efficacité en ces temps de guerre. Il n’oubliait pas ses promesses électorales et appliqua des mesures de justice sociale, ce qui explique aisément l’écrasante victoire électorale du Labour en 1945. Il devint logiquement Premier ministre. Il se consacra davantage aux Affaires étrangères et participa donc à toutes les conférences internationales (comme par exemple celle de Postdam) et fut partisan d’un nouveau Commonwealth des nations. Sur le plan intérieur, son gouvernement nationalisa l’énergie, la Banque d’Angleterre, les Transports et la sidérurgie. En outre, Attlee fit voter et promulguer le « Welfare State », l’état providence instituant un système national de soins de santé. Toutefois, il se mit à douter de l’efficacité des nationalisations et ralentit l’établissement du Welfare State du fait notamment de dépenses de réarmement toujours plus importantes. Cette politique l’éloigna logiquement des socialistes les plus radicaux. Il se vit donc combattu à gauche et le maintien d’une certaine austérité lui mit à dos les classes moyennes. Toutefois, il remporta de justesse les élections de 1950 mais tenta maladroitement d’élargir sa majorité par un retour aux urnes l’année suivante. Ce fut un échec retentissant et Attlee se vit contraint de quitter le pouvoir, définitivement. Il écrivit ses mémoires qui sortirent en 1954 sous le titre de As it happened.
Support : deux feuilles de papier
Hauteur : 242 mm
Largeur : 192 mm
Cote : ARB Archives Spaak - caisse 39 - farde 369