Lettre à Rita Lejeune et Jacques Stiennon, 7 février 1966
Bruxelles, le 07. 2.1966
Ministère des Affaires étrangères
et du Commerce extérieur
Le Ministre des
Affaires Etrangeres
Madame Rita Lejeune et
Monsieur Jacques Stiennon
Aux bons soins des Editions « Arcade »,
299, avenue Van Volxem,
Bruxelles 19.
Chère Madame,
Cher Monsieur,
J’ai été extrêmement sensible à la délicate attention que vous avez eue de m’offrir, aimablement revêtus de votre signature, les deux tomes du remarquable ouvrage dû à votre grand talent.
Cette œuvre enrichira considérablement ma bibliothèque.
Je vous remercie infiniment de votre envoi et vous prie de croire, chère Madame, cher Monsieur, à l’assurance de mes sentiments très distingués.
P.H. Spaak
Quand il fit taper cette lettre adressée à Rita Lejeune et Jacques Stiennon, Paul-Henri Spaak savait sans doute que les jours du gouvernement Harmel étaient comptés. Composé de sociaux-chrétiens et de socialistes, deux partis sortis affaiblis des élections de mai 1965, ce gouvernement n’avait pas réussi à s’imposer, miné par les questions linguistiques, les problèmes financiers et sociaux. Pierre Harmel présenta la démission de son gouvernement le 4 février 1966. Il essuya un refus du roi qui, le lendemain, se fendit d’une lettre publique où il fustigeait l’évolution de la vie politique belge et se désolait de la diminution de l’autorité dans tous les secteurs de la vie nationale. Cette initiative s’avéra vaine et Baudouin dut se résoudre à accepter la démission du gouvernement le 10 février1. On comprend que la signature de Spaak trahisse la rapidité avec laquelle elle fut conçue, surtout quand on la compare avec la dédicace présente dans l’exemplaire des Combats Inachevés2 de la Bibliothèque Dexia conservée par l’Académie royale de Belgique. Les lettres du nom de famille y sont bien lisibles et ne se résument pas comme ici à une ligne irrégulière.
Il s’agissait aussi sans doute de traiter le plus rapidement possible ce courrier qui s’apparente fort à une lettre de remerciement type. Nous n’avons trouvé dans la littérature consacrée à Spaak aucune référence à une lecture de La Chanson de Roland durant son existence. L’hypothèse n’est cependant pas invraisemblable : n’était-il pas le fils du poète et dramaturge Paul Spaak ? La présence de La Chanson de Roland dans la bibliothèque paternelle et, partant, sa lecture par le fils, sont concevables. Cette supposition eut été certainement balayée d’un revers de la main par les détracteurs du ministre des Affaires étrangères qui l’accusaient d’inculture. Toutefois, même si la politique fut la principale passion de sa vie, la réalité diffère. Sa culture littéraire était certaine, classique avant tout : il appréciait beaucoup Racine. Il aimait également Victor Hugo et Péguy. Il ne dédaignait pas non plus les auteurs contemporains comme Albert Cohen, Marcel Achard, Saint John Perse et Plisnier. Il appréciait aussi la poésie, principalement Valéry. Les romans policiers et les romans noirs - Erle Stanley Gardner surtout - faisaient l’objet de ses lectures et, vu sa carrière politique, on s’étonnera peu qu’il se délectait de livres d’histoire3.
1 DUJARDIN V., DUMOULIN M., Nouvelle histoire de Belgique 1950-1970. L’Union fait-elle toujours la force ? , Bruxelles, Le Cri édition, 2008, p. 119-128.
2 Combats inachevés. I De l’indépendance à l’alliance, Bruxelles, Paris ; Vokaer Marc, Fayard, 1969, 315 p. (ARB N5201 T1).
3 DUMOULIN M., Spaak, Bruxelles, Éditions Racine, 1999, p. 696-698.
Monographies er article relatifs à Paul-Henri Spaak
DUCHENNE G., DUJARDIN V., DUMOULIN M. (dir.), Paul-Henri Spaak et la France : actes du colloque : Louvain-la-Neuve, 15-16 mai, Bruxelles, 2007, 300 p.
DUCHENNE G., DUJARDIN V., DUMOULIN M. (dir.), Rey, Snoy, Spaak : fondateurs belges de l'Europe : actes du colloque organisé par la Fondation Paul-Henri Spaak et l'Institut historique belge de Rome = Belgisch Historisch Instituut te Rome, en collaboration avec le Groupe d'études d'histoire de l'Europe contemporaine les 10 et 11 mai 2007 à l'Academia Belgica à Rome, Bruxelles, Bruylant, 2007, 455 p., ill. (Coll. Bibliothèque de la Fondation Paul-Henri Spaak).
DUJARDIN V., DUMOULIN M., PLASMAN P.L., Bruxelles, Le Cri, 2007, 186 p.
DUMOULIN M., Spaak, Bruxelles, Éditions Racine, 1999, 735p. (préface d’Étienne Davignon).
HUIZINGA J.H., Paul-Henri Spaak : de l'émeute à l'OTAN, Bruxelles, Legrain, 1988, 270 p. (traduit de l’anglais par Guy Scheyven).
OUTERS L., Paul-Henri Spaak : son dernier combat, Rénovation, Bruxelles, 1972.
SMETS P.-F., Il faut faire l'Europe, Trente ans de la vie et des combats de Paul-Henri Spaak, Bruxelles, Fondation Spaak, 1992, 117 p.
SMETS P.-F., La Pensée européenne et atlantique de Paul-Henri Spaak. 1942-1972, Bruxelles, J. Goermaere, 1980, 2 vol., 1251 p.
SMETS P.-F., Les pères de l'Europe : cinquante ans après : perspectives sur l'engagement européen : actes du Colloque international des 19 et 20 mai 2000, Bruxelles, Palais d'Egmont, Bruxelles, Éditions Bruylant, 2001, 236 p. (coll. Bibliothèque de la Fondation Paul-Henri Spaak).
WILLEQUET J., Paul-Henry Spaak, Bruxelles, La renaissance du livre, 1975, 282 p., ill.
WILLEQUET J., « Spaak (Paul-Henri) », in Biographie nationale, Bruxelles, Académie royale de Belgique, supplément, t. XI, 1976, col. 800-806. Notice en ligne disponible ici.
Livre de Paul-Henri Spaak
Combats inachevés. I De l’indépendance à l’alliance. II De l’espoir aux déceptions / par Spaak Paul-Henri. - Bruxelles, Paris ; Vokaer Marc, Fayard, 1969, 2 t., pp. 315-444.
Paul Henri Spaak
Né à Schaerbeek le 25 janvier 1899, décédé à Bruxelles le 31 juillet 1972. Avocat et homme politique belge. Premier ministre de 1938 à 1939, en 1946 et de 1947 à 1949. Ministre des transports en 1935 avant de devenir Ministre des Affaires étrangères en 1936, un poste qu’il occupera à de nombreuses reprises jusqu’à sa retraite politique en 1966. Président du Parlement européen de 1952 à 1954. Secrétaire général de l’OTAN de 1957 à 1961.
Support : 1 feuille de papier
Hauteur : 296 mm
Largeur : 210 mm
Cote : 23110 a, 10