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Ordre de paiement du 14 avril 1785

Je prie Monsieur Collibeaux de payer au sieur Fremineau marchand de bois la somme de douze - cent quatre vingt dix sept livres dix sol ; pour solde de la fourniture qu’il a fait pour ma maison pendant le mois de mars. Fait à Louveciennes ce 14 avril 1785. La comtesse du Barry.

Bon pour 1297 livres 10 sols

Monsieur Collibeaux controleur des rentes de la ville rue neuve Saint Eustache

[verso]

Nous voici face à la Comtesse du Barry au quotidien, loin des intrigues et des romances. Nous imaginons qu’elle paie ici, via les services de M. Collibeaux, le dénommé Fremineau pour du bois servant au chauffage de sa propriété de Louveciennes donnée par Louis XV en 1769 comme nous l’avons vu dans la biographie. Louis XVI, quoique très hostile à la maîtresse de son prédécesseur dans un premier temps, lui conserva malgré tout ses revenus, ses biens personnels, sa propriété de Louveciennes et surtout ses revenus de près de 150.000 livres de rentes annuelles. Cette somme de 1297 livres et 10 sols étaient donc loin d’être négligeable mais on sait que Jeanne du Barry vécut toujours confortablement jusqu’à la fin de son existence. Nous en voulons pour preuve toutes les richesses cachées aux révolutionnaires et dont elle dévoila les caches le jour de son exécution, croyant - contre toute logique - la République d’alors capable de pardon pour ses fautes passées.

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DE GONCOURT E. & J., Les maîtresses de Louis XV et autres portraits de femmes, Paris, Robert Laffont, 2003, XXII-1086 p. (édition établie et présentée par Robert Kopp).

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Jeanne Bécu, comtesse du Barry

Jeanne Bécu était la fille d’Anne Bécu, couturière, et, hypothèse la plus probable, de Jean-Baptiste Gomard de Vaubernier, un capucin. Devenu prêtre à Saint-Eustache (Paris), ce dernier avait fait placer la petite Jeanne dans le couvent des dames de Sainte-Aure (Paris), où elle reçut une éducation soignée durant cinq ans. Elle s’initia d’abord brièvement à la coiffure puis devint femme de chambre de Madame de Delay de Lagarde. Congédiée du fait de l’attirance qu'éprouvaient pour elle deux fils de cette dernière, Jeanne Bécu devint ensuite vendeuse chez le marchand de modes Labille dont les magasins jouxtaient les jardins du Palais royal. Son physique avenant lui attira rapidement l’attention de la gent masculine. Elle fit ensuite la connaissance de Jean du Barry, devient sa maîtresse et s’installa chez lui. Le salon de ce dernier était souvent rempli des personnages importants de l’époque et Jeanne s’y adonna à la galanterie sans retenue.

Jean du Barry nourrissait des ambitions à son égard : il désirait qu’elle devînt la maîtresse du roi et parvint à la faire connaître par le souverain. Louis XV s’enflamma rapidement pour Jeanne mais le début de leur relation fut tout empreint de discrétion. Il en alla tout autrement sitôt advenue la mort de la reine, Marie Leszczinska : elle devint officiellement la maîtresse du roi. Pour être présente à la Cour, il fallait cependant qu’elle fût mariée au plus vite à un gentilhomme. Elle se maria donc avec Guillaume, le frère de Jean du Barry. Son arrivée au sein de la Cour provoqua quelques grincements : ses origines modestes lui valaient le mépris et la haine de bien des courtisans. Le plus puissant de ceux-ci était le ministre Choiseul et il fit tout son possible pour nuire à la réputation de la nouvelle venue, notamment par le biais de plusieurs pamphlets. Derrière lui, on trouvait également Marie-Antoinette et le futur roi Louis XVI. Jeanne du Barry pouvait aussi compter sur quelques partisans comme par exemple le maréchal de Richelieu ou encore le duc d’Aiguillon.

Tous ces appuis n’étaient sans doute pas suffisants : à la mort de son royal amant, Louis XVI ordonna rapidement l’arrestation de la courtisane et la fit conduire à l’abbaye de Pont-Aux-Dames. Au début de 1775, elle obtint la permission de quitter le cloître mais elle devait se tenir à dix lieues de la Cour. L’année suivante, elle fut également autorisée à revenir dans son domaine de Louveciennes, une propriété qu’elle avait obtenu du souverain défunt en 1769. Du reste, elle conservait ses revenus qui lui permettaient de mener une vie confortable. Quelques années plus tard, elle entama une relation avec le gouverneur de Paris et capitaine des Cents-Suisses, Louis Hercule Timoléon de Brissac. La Révolution française advint et, de par sa position et ses liens avec Brissac, Jeanne ne put rester indifférente aux convulsions politiques de l’époque. Elle accueillit des gardes du corps de la Cour blessés et aida financièrement le couple royal. Les nuages s’amoncelaient cependant : Jeanne était parfois la cible des révolutionnaires et des cambrioleurs s’emparèrent d’une grande partie de ses bijoux en janvier 1791. On l’avertit que ceux-ci avaient été transférés en Angleterre. Elle avait donc un bon prétexte pour s’y rendre et y séjourna plusieurs mois en 1791. Elle fut bien accueillie par les émigrés à qui elle apportait des lettres et de l’argent. En septembre de l’année suivante, elle eut la douleur de perdre son amant dans des circonstances atroces : accusé d’opinion royaliste, celui-ci s’était fait lyncher dans les rues de Versailles. Comme souvent à l’époque en France, sa tête fut plantée au bout d’une pique et la foule munie de ce trophée se rendit au domaine de la comtesse à Louveciennes. On eut soin de lancer la tête de Brissac par une fenêtre laissée ouverte…

Peu de temps après cet épisode traumatisant, Jeanne se rendit à nouveau en Angleterre et eut soin de prévenir Lebrun, le ministre des Affaires étrangères, qu’elle n’émigrait pas mais partait pour le procès intenté à l’encontre des voleurs de ses bijoux. Toutefois, ses activités contre-révolutionnaires de l’autre côté de la Manche sont certaines et elle fit l’erreur de revenir en France en mars 1793. Bien mal lui en prit. À son arrivée à Louveciennes, elle constata que les scellés avaient été apposés sur son domaine : ils signifiaient clairement qu’elle était considérée comme émigrée. Le 26 juin, un certain Greive la dénonça comme antipatriote et la fit arrêter. Des habitants de Louveciennes déposèrent cependant une pétition en faveur de la « citoyenne Dubarry ». Cette initiative lui valut d’être libérée mais Greive n’était pas décidé à lâcher prise, bien aidé en cela par la Loi des suspects votée le 17 septembre. Le 22 septembre, il réussit à la faire arrêter à nouveau, non sans s’emparer de papiers compromettants. Elle se vit conduite à la prison de Sainte Pélagie (Paris). Des interrogatoires s’ensuivirent où l’ancienne favorite fit parfois preuve de maladresse. Elle fut transférée le 19 novembre à la Conciergerie. On lui annonça alors qu’elle était prévenue d’émigration, d’avoir fourni des fonds aux émigrés ainsi que d’avoir entretenu des rapports suspects avec eux. Le Tribunal révolutionnaire la condamna à mort le 7 décembre. Le lendemain, elle chercha à sauver sa tête en dévoilant où se trouvaient toutes les caches contenant de l’argent, des bijoux, etc. Sitôt sa longue déclaration terminée et dûment signée, elle n’en fut pas moins remise aux soins du bourreau.

Support  : 1 feuille de papier, 1 pli

Hauteur  : 108 mm
Largeur  : 166 mm

Cote  : 19346/1635