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Lettre au duc de Damas-Crux, 20 janvier 1828

Mon cousin, nous vous faisons cette lettre pour vous dire que vous vous rendiez le cinq février prochain au Louvre, à l’effet d’y assister à l’ouverture de la session des chambre ; et à cela ne faites faute, car tel est notre plaisir : la présente n’étant à autres fins, sur ce, je prie Dieu, mon cousin, qu’il vous ait en sa sainte et digne garde.
Donné au château des Tuileries, le vingt janvier de l’an de grâce mil huit cent vingt huit, et de notre règne le quatrième.

 

Charles



 

Comte Portalis

Le lecteur interprétant la lettre ci-dessus comme étant la manifestation d’une attention particulière de Charles X pour le duc de Damas-Crux ferait sans doute une mauvaise interprétation. En effet, de par le règlement du 13 août 1814, les pairs de France et les députés de la Chambre étaient tous convoqués individuellement à l’ouverture de la session des chambres. La signature en bas du document de Portalis, nouveau garde des sceaux, témoigne d’ailleurs du caractère officiel de cette missive. Bien entendu, il n’était peut-être pas indifférent pour le roi que le duc soit présent le 5 février : ce dernier n’était-il pas de longue date un fidèle de la famille régnante, au point de refuser plus tard de prêter serment à la monarchie de Juillet ? Dans l’état actuel des recherches, rien cependant ne permet de confirmer cette hypothèse.

« Artois (Charles-Philippe, comte d') 1757-1836 », in TULARD J. (dir.), La Contre-Révolution. Origines, histoire, postérité, Paris, CNRS Éditions, 2013, p. 431-432.

BORDONOVE G., Les Bourbons. De Louis XVI à Louis-Philippe 1774-1848, Paris, Éditions Flammarion, 2004, 1098 p.

BORDONOVE G., Charles X 1824-1830. Petit-fils de Louis XV, Paris, Pygmalion, 2008, 317 p.

CABANIS J., Charles X, roi ultra, Paris, Gallimard, 1972, 521 p. (coll. Leurs figures).

CASTELOT A., Charles X. La fin d’un monde, Paris, Librairie Académique Perrin, 1988, 587 p.

DE LA GORCE P., La Restauration II. Charles X, Paris, Librairie Plon, 1928, 342 p.

FÉLIX J., « Charles X, comte d'Artois, Charles Philippe », in MARTIN J.C., Dictionnaire de la contre-révolution, Paris, Perrin, p. 154-155.

FRANCESCHINI É., « Damas (Étienne-Charles, duc de), de la branche de Crux », in ROMAN D’AMAT R., LIMOUZIN-LAMOTHE R. (dir.), Dictionnaire de biographie française, Paris, Librairie Letouzey et Ané, t. X, 1965, col. 26-27.

METTRA C., La France des Bourbons. II. Du Régent à Charles X, Bruxelles, Éditions Complexe, 1981, 329 p.

TURQUAN J., D’AURIAC J., Les frères de Louis XVI. Monsieur le comte d’Artois, Paris Éditions Émile-Paul Frères, 1928, 315 p.

VIVENT J., Charles X. Dernier Roi de France et de Navarre, Paris, 1958, 406 p.(coll. Présence de l’histoire)

Charles X

Charles naquit à Versailles et était le quatrième fils du Dauphin Louis (fils de Louis XV) et de Marie-Josèphe de Saxe (fille de l’électeur Frédéric-Auguste III). Il avait pour frère Louis Auguste, duc de Berry (futur Louis XVI) et Louis Stanislas Xavier, comte de Provence (futur Louis XVIII). Louis XV lui donna le nom de comte d’Artois. Sa petite enfance s’écoula sans incident. Cependant, le Dauphin et son épouse décédèrent rapidement, respectivement en 1765 et en 1767. Louis XV servit de père aux orphelins mais de façon assez lointaine : le duc de La Vauguyon était le véritable maître de Charles et de ses frères et sœurs. Le duc se préoccupait peu du comte d’Artois qui n’était pas appelé à régner. Ce dernier montrait peu de dispositions pour l’étude et se distinguait à la Cour par son espièglerie et sa désinvolture. À l’âge de quinze ans, il fut nommé colonel général des Suisses et se sentit alors une vocation guerrière. La Cour n’appréciait pas cela et fit tout pour étouffer dans l’œuf cette ambition. Elle y réussit et, dès lors, Charles se montra frivole, dépensier et s’intéressa aux femmes. Il fut marié en 1773 à Marie-Thérèse de Savoie avec qui il eut quatre enfants. Son frère arrivé au pouvoir, ses frasques ne connurent plus de limites : le comte d’Artois profitait de la faiblesse du nouveau souverain et de l’amitié de la reine pour dépenser sans compter. Cela lui valut une perte de popularité auprès d’une bonne partie du peuple parisien et l’image de la Cour dans son ensemble en fut affectée. En politique, il s’avérait un conservateur sans nuance et peu lui importait les signes de faiblesses de la monarchie. Il n’était pas question pour lui de réformes et si les déficits augmentaient, ils suffisaient simplement d’augmenter les impôts. On s’étonnera peu dès lors que dès 1787, il se rangea dans le camp des absolutistes intransigeants. Sa défense farouche des privilèges de la noblesse renforcèrent encore son impopularité. Louis XVI, craignant pour la vie de son frère, lui ordonna de quitter Paris au lendemain de la prise de la Bastille. Le comte d’Artois rejoignit Bruxelles puis Turin où il fut reçu par son beau-père, le roi de Sardaigne. Dans cette ville, un comité contre-révolutionnaire vit le jour et Charles en prit la tête. Les buts de ce comité n'étaient rien moins que de libérer la famille royale et de provoquer une révolte armée dans plusieurs provinces françaises. À la tête des émigrés, il prit goût aux intrigues et au pouvoir et se montra de plus en plus indépendant de ses frères. Il s’assura également une clientèle de partisans, les futurs « ultras » qui lui obéiront jusqu’à sa mort. Les pourparlers avec les souverains étrangers s’avérèrent toutefois sans succès, à l’exception notable de Gustave III de Suède. L’attitude des souverains changea toutefois suite à l'épisode de Varenne et surtout après la déclaration de guerre de la France à François II, roi de Bohême et de Hongrie. La première campagne s’acheva lamentablement pour les réactionnaires et d’Artois, très déprimé, se retira à Hamm en décembre 1792. L’émigration se divisa ensuite entre partisans du comte d’Artois, ceux de Condé et ceux de Monsieur devenu Louis XVIII après la mort de Louis XVII au temple. Charles fut nommé lieutenant-général du Royaume : il était chargé de superviser les opérations à l’Ouest. À cet effet, il s’installa à Londres pour superviser les opérations. Celles-ci échouèrent lamentablement quand Hoche écrasa les royalistes. D’Artois s’opposa ensuite souvent à son frère, partisan d’une conduite pragmatique envers Bonaparte au début du Consulat. S’il n’a pas été responsable de l’attentat de la rue Saint-Nicaise mené par Hyde de Neuville, un de ses proches, il a soutenu ouvertement toutes les menées de Cadoudal. L’échec et la mort de ce dernier ainsi que la proclamation de l’Empire interdirent tous succès aux Bourbons pour dix ans.
Advint ensuite la Restauration : Charles devint le chef du parti royaliste qui combattit la politique modéré de Louis XVIII. Il succéda à son frère le 24 septembre 1824. Rapidement, le nouveau pouvoir prit plusieurs mesures réactionnaires comme par exemple la loi sur les sacrilèges le 20 avril 18251. Certains textes furent toutefois retirés par le ministre Villèle tant ils rencontrèrent de résistances : nous pensons par exemple à la « loi de justice et d’amour » étouffant de fait la liberté de la presse. Des élections eurent lieu fin 1827, amenant une majorité moins favorable aux royalistes intransigeants et à l’extrême-droite. L’année suivante, Charles X dut composer avec un ministre (Martignac) qu’il n’appréciait pas. Il réussit à s’en débarrasser en août 1829 et le remplaça par Polignac dont le cabinet n’était composé que d’ultras. Des élections eurent ensuite lieu le 23 juin et le 2 juillet 1830 : une écrasante majorité contre le ministre sortit des urnes. Charles X commit ensuite une grave erreur le 25 juillet en signant quatre ordonnances qui suspendaient la liberté de la presse, dispersaient la chambre nouvellement élue, réformaient la loi électorale et fixaient à septembre la date des nouvelles élections. Paris se souleva les 27, 28 et 29 juillet et Charles X n’eut d’autre choix que de renoncer au pouvoir. Il quitta la France pour rejoindre l’Angleterre et ensuite trouver asile à Prague où il passa le restant de sa vie. Il décéda à Gorizia le 6 novembre 1836.

 

Lettre

Support : une feuille de papier, un pli

Hauteur : 232 mm
Largeur : 173,5 mm

Cote  : 19346/1038

Portrait

Sa Majesté Charles X. Roi de France
J. lith. de Delpech (avec une signature de Charles X en fac-similé)

Hauteur : 275 mm
Largeur : 182 mm

Cote  : 19346/1038